Les marketeurs suivent avec intérêt les conversations sociales. Sont-elles pour autant une recette miracle permettant de mieux comprendre le consommateur ? Les réseaux sociaux font partie des outils privilégiés des consommateurs et leurs usages sont multiples : s’exprimer, se plaindre auprès d’une marque, rechercher des informations sur tel produit ou service, recueillir l’avis d’autres individus, chercher une solution à un problème, connaître les dernières tendances… Ils représentent également une mine d’or pour les entreprises en termes d’insight et de connaissance client. L’analyse des informations produites par les réseaux sociaux peut permettre aux entreprises d’anticiper le comportement des consommateurs.
Naagesh Padmanaban, analyste en risque bancaire chez Cognizant Technology Solutions, fournisseur de services IT dans la finance, donne ainsi une illustration avec son secteur d’activité. De cette manière, il est plus aisé d’établir un profil de risques financiers en fonction du réseau social qu’utilise le client en question. Il cite également la possibilité pour les entreprises de se renseigner sur la concurrence via les réseaux sociaux en traquant les commentaires des internautes sur les produits des autres marques. En plus de récolter la voix des consommateurs, un tel procédé permet de mieux connaître leurs besoins et d’adapter ses produits et services en conséquence. La logique commence à être bien connue.
Mais les données sociales n’ont-elles pas de faille ? Cette question peut renvoyer à de nombreux débats durant la période de l’économie classique portant sur la rationalité des consommateurs. Découvrons l’avis d’un spécialiste.
Prédire les irrationalités du consommateur
A l’occasion du lancement de la nouvelle rubrique idée.zip by BVA, en partenariat avec Marketing Magazine, Richard Bordenave, directeur associé de la société d’étude, nous livre son opinion concernant le best-seller « Predictably irrationnal », écrit par Dan Ariely, professeur d’économie comportementale à la Duke University. Richard Bordenave adhère à la plupart des idées énumérées dans cet ouvrage. Selon lui, le consommateur ne serait pas un individu rationnel et calculateur qui maximiserait son propre intérêt en évaluant toute l’information disponible. Au contraire, il estime comme Dan Ariely que certains achats du consommateur ne sont pas spécialement influencés par des nécessités d’intérêt personnel mais parfois par des mécanismes psychologiques subjectifs qui altèrent sa capacité de jugement.
C’est pourquoi, il estime que les circonstances de l’achat sont aussi importantes que la décision des consommateurs lorsqu’il s’agit d’analyser le comportement. En effet, les choix sont souvent motivés par le biais de jugements tellement systématiques qu’ils sont facilement prévisibles malgré l’irrationalité théorique initiale.
Ainsi, la plupart des consommateurs associent le prix à la qualité. En d’autres termes, un médicament payé plus cher serait étonnement plus efficace. L’humeur modifie également la capacité de jugement. Un consommateur est plus enclin à dépenser beaucoup d’argent sur un moment d’excitation agréable même s’il juge la dépense totalement irresponsable. Dans son ouvrage, Dan Ariely, décrit de puissants mécanismes sociaux, comme l’effet de groupe ou l’altruisme, qui jouent également un rôle clé dans le comportement d’achat des consommateurs. Le premier qui exprime son choix dans un restaurant n’influence-t-il pas celui des autres ?
La difficulté pour l’entreprise revient au final à faire la part des choses entre ce qu’elle croit savoir de ses clients et ce qu’il est possible de constater réellement. En ce sens, il ne parait pas forcément impératif pour les entreprises d’être omniprésentes sur les réseaux sociaux pour analyser toutes les conversations sociales. Un service client tourné vers le social pourrait avoir des effets beaucoup plus palpables en termes de connaissance et d’amélioration de la relation client. Les messages des consommateurs seraient plus authentiques, enlevant ainsi le caractère généraliste que les données sociales peuvent souvent révéler. Et les entreprises n’auraient nul besoin de se casser la tête pour déceler d’éventuelles motivations irrationnelles.